Ablaye Cissoko & Volker Goetze « Amanké Dionti »

« Amanké Dionti » est le fruit d'une collaboration pas ordinaire entre Ablaye Cissoko, chanteur et joueur de kora sénégalais (qui a joué notamment avec Omar Pene), et Volker Goetze, trompettiste d'origine allemande, aujourd'hui installé à New York. L'un nous enracine dans sa terre africaine alors que l'autre avec sa sonorité aérienne nous élève vers les cieux. Leur musique dépasse toutes les frontières imaginables et on y retrouve la même beauté universelle que dans la collaboration entre Ali Farka Touré et Toumani Diabaté il y a quelques années. Et c'est un sentiment de plénitude et de sérénité qui nous envahit. Avec le magnifique titre « Amanké Dionti », on songe au « Folon » de Salif Keita, alors que « Haïti » rend un vibrant hommage à un peuple terriblement meurtri. Même une chanson traditionnelle comme «  Miliamba »,  d'une infinie tristesse, vous remplie de paix intérieur. Quasi-religieux (qui plus est cet album a été enregistré à l'église « Bon secours » de Paris) !

 Ablaye Cissoko & Volker Goetze - Amanké Dionti - 2012 - Motema Music


La playlist vidéos de juin 2012

Ce mois de juin a été marqué par un Euro historique pour l'Equipe de France de football. Enfin une victoire dans un grand tournoi international, qui plus est contre le pays organisateur, et une élimination "pas ridicule" contre le champion d'Europe/du Monde en titre. Et hop, on rentre à la maison pour laisser les vrais cadors s'affronter. ça nous laisse un peu de temps pour nous délecter de cette nouvelle sélection vidéos avec entre autres la pop entrainante d'Edward Sharpe & The Magnetic Zeros, le folk intimiste de Soko, les boucles bulgares de Kottarashky & The Rain Dogs, le hip-hop incisif d'Action Bronson, la voix rauque de Slow Joe and The Ginger Accident, Rufus Thomas au festival Wattstax en 1972 ou encore une reprise habitée du "Roxane" de The Police par Ayanna Witter-Johnson

Neneh Cherry & The Thing « The Cherry Thing »

« The Cherry Thing » n'est pas le nouvel album solo de Neneh Cherry, actuellement en préparation, mais le fruit d'une collaboration avec The Thing, trio scandinave de free jazz. Une connexion naturelle parce que la chanteuse est moitié Suédoise par sa mère et que son père Don, est tout simplement l'inspirateur du groupe qui tire son nom d'un de ses titres. Tellement naturelle que l'enregistrement n'a duré que quatre jours. C'est déjà énorme pour des musiciens rompus aux improvisations et aux "one shot", mais ça peut sembler bien peu pour une artiste comme Neneh, plus habituée aux productions bien léchées de la pop ou du trip-hop. Mais elle s'en accommode très bien, en utilisant sa voix comme un instrument, et donnant une tonalité vraiment pop à l'ensemble. L'album constitué principalement de reprises (« Dream Baby Dream » de Suicide, « Accordian » de Madvillain, « Dirt » des Stooges, «  Golden Heart » de Don Cherry justement, ou encore «  Too Tough To Die » de Martina Topley Bird  ) est bourré d'énergie et la base rythmique laisse au sax le soin de partir en vrille, ce qu'il fait plutôt pas mal d'ailleurs. Une véritable bouffée de liberté jamais bien loin du chaos.

Neneh Cherry & The Thing - The Cherry Thing - Small Town Super Sound - 2012





En bonus, le « Dream Baby Dream » revisité par Four Tet :


Nicolas Repac « Black Box »

Ouvrir la boite noire de Nicolas Repac c'est plonger dans le blues et la musique noire originelle mais c'est aussi perdre ses repères spatio-temporels. Les voix samplées ou enregistrées pour l'occasion proviennent souvent d'Amérique du Nord, mais parfois d'Afrique, comme avec celle de l'Angolais Bonga sur « Cenas De Gaby », ou encore d'Europe avec le chant poignant de la Serbe Stana Selimovic sur « Slepa Ljubav ». On passe aussi d'une époque pas si lointaine où les "Works song" rythmaient le labeur des esclaves noirs dans la chaleur des champs de cotons, au 21ème siècle, où les machines sont omniprésentes. Mais plonger dans cette boite confectionnée par le bidouilleur français, c'est aussi découvrir quelques bijoux comme « All Ready ? », bricolage sonore rappelant un peu le « Cayenne c'est fini » d'Higelin, ou « Betty Loop » une version personnelle du « Black Betty » popularisé par Ram Jam en 1977. Des bijoux  de blues contemporain que Nicolas Repac fabrique en empruntant des sons ici et là, avant de les manipuler et les ré-assembler tel un véritable orfèvre.

Nicolas Repac - Black Box - 2012 - No Format

Pouss'Disques N°9 - Ladies

Un Pouss'Disques consacré aux ladies, avec des interprètes le plus souvent masculin. Enjoy !
  • Ken Boothe "Lady With The Starlette"
  • Blundetto "My One Girl (with Lateef The Truespeaker)"
  • Harry Belafonte "Coconut Woman"
  • The Budos Band "My Girl"
  • Rikki Ililonga & Musi-O-Tunya "Lovely Woman"
  • Lee Fields & The Expressions "Ladies"
  • LaBelle "Lady Marmalade"
  • Lee Dorsey "Wonder Woman"
  • Nancy Sinatra "Lady Bird (with Lee Hazlewood)"
  • ALoe Blacc "Femme Fatale"
  • Nicolas Jaar "I Got A Woman"
  • Animal Collective "My Girls"
  • Timber Timbre "Woman"
  • Lou Reed "Goodnight Ladies"

      Akua Naru « Live & Aflame Sessions »

      « The Journey Aflame » sorti l'an dernier était déjà plein de promesses et on sentait bien qu'Akua Naru, jeune américaine d'origine ghanéenne installée à Cologne en Allemagne, avait un certain talent. Malgré tout il manquait parfois d'un peu de peps. Du coup ce « Live & Aflame Sessions » constitué de ré-enregistrements de son premier album est le bienvenu puisqu'il ne fait que magnifier ses morceaux. Cette session d’enregistrement avec son groupe DIGFLO et une section de cuivres en fusion, déborde d'énergie et de groove. L'enchainement « The Backflip: Reflipped », son intro à la Rage Against The Machine, le flow acéré d'Akua, et les cuivres qui rappelle Blitz The Ambassador, « Nag Champa Gold » plus jazz/soul et son sample du « Feeling good » de Nina Simone, suivi de La pépite « Tales Of (Wo)men », sa flute psyché, ses arpèges de guitare à l'africaine, et son explosion de cuivres funky, est un pure délice ! Assurément le voyage d'Akua Naru ne fait que commencer car avec un tel talent et tellement bien accompagnée, il risque de la mener très très loin !

      Akua Naru - Live & Aflame Sessions - 2012 - Jakarta Records

      L'album est en écoute en intégralité sur le bandcamp et  accompagné d'une série de vidéos de la session avec ici « Tales Of (Wo)Men » :

      The Soul Rebels Brass Band « Unlock Your Mind »

      Les amateurs de la série « Treme » vont certainement se régaler de cette première véritable sortie du groupe de la Nouvelle Orleans. Avec un répertoire destiné au live et une réputation qui n'est plus à faire avec un rythme de 250 concerts par an, la bande des huit balance sa mixture de jazz-funk en y apportant une véritable fraicheur faite de touches reggae, hip-hop et rock. Mais sa principale force réside dans la présence de voix sur la plupart des titres, parfois rappés comme sur « I Made It », d'autre fois chantés comme sur « Unlock your mind », reprise funky du classique reggae de Staple Singers avec Cyril Neville au chant, celui-là même qui avait baptisé la bande The Soul Rebels à ses débuts. On découvre d'autres reprises comme « Sweet Dreams », le célèbre tube 80's d'Eurythmics en version hyper funky, et « Living for the city » de Stevie Wonder, moins surprenant, mais tout aussi bon. De bien bonnes vibrations ! Laissez-vous porter par le rythme du sousaphone et entrainer au côté de la seconde ligne dans les rues de la Nouvelle Orleans.

      The Soul Rebels Brass Band - Unlock Your Mind - Rounder Records - 2012



      "Moonrise Kingdom", Wes Anderson

      Wes Anderson fait partie de ces artistes brillants, inspirés, tellement élégants, mais qui vivent sur une autre planète. Quand on lui rend visite et qu’on goûte à ses films, tout laisse à penser que là-bas, il s’éclate comme un fou !
      On est en 1965, nous avons été catapultés sur une petite île de la Nouvelle Angleterre. Bienvenue dans le camp scout du Renard grincheux. Ici les adultes se comportent comme des enfants et les enfants sont des animaux (plus d’une fois on repense au merveilleux Fantastic Mister Fox, son précédent opus, tellement plus inspiré !). Sam est notre héros, on le reconnait facilement il est habillé comme Davy Crockett, avec une toque à queue de renard. Quand à Suzie c’est une jolie petite mésange bleue et puis après une sorte de lotita, maquillée comme une poupée fatale. Les deux petits cocos ne vont pas tarder à se trouver très à leurs goûts et décider de s’enfuir dans la nature pour y vivre leur amour naissant. Ce qui évidement ne sera pas du goût des adultes irresponsables et lâches que sont leurs parents le shérif et le chef du camp scout.

      Disons tout de suite notre déception face à ce nouvel opus, formellement réjouissant mais par ailleurs un peu vain. Comme souvent chez ce peintre pop qu’est Wes Anderson, l’histoire est prétexte à accoucher de scénettes, de tableaux élégants, mais ici tout est faux, c’est comme du coloriage. Certes, chaque scène est sertie de trouvailles, chaque second plan apporte de la malice, du charme, ce petit humour spécial “from another planet” et cela suffit pour que l’on passe un très beau moment, mais sinon... On s’en fout un peu.

      Le problème est que la patte, quelque peu artificielle, rend l’histoire toc et toute émotion impossible. C’est bien dommage car tout est là. En enfant très gâté Wes Anderson a sous la main des figures fantastiques. L’ami Bill Murray toujours passionnant, parade en pantalon de golf, la bouteille de vin à la main, dans l’autre il tient une hache: mais vas-y Bill, va couper un arbre dans ton jardin ! Et il y va. Avec son petit short et ses écussons de castor, Edward Norton nous offre une composition très curieuse. La clope au bec et le foulard bien repassé il parade tel un chef d’orchestre au milieu de ses instruments, il les maîtrise tous. La vie est une chorégraphie bien huilée mais sitôt que les éléments dégénèrent il se retrouve complètement perdu. Pourtant il tient bon et comme tout le monde il fait n’importe quoi. On le retrouve plus loin, bouleversé et seul, malheureusement on ne ressent pas grand-chose. A la fin il porte sur son dos, le valeureux Harvey Keitel en short lui aussi. Mais qu’est ce qu’il fout là ce sac de patates, il n’a pas mieux à donner comme acteur génial qu’il est ? C’est peu léger monsieur Anderson. On a le sentiment que ça pourrait être tellement plus fort. Bruce Willis s’en sort très bien, certes il est sheriff et il vit dans une caravane pourrie mais il a du cœur, c’est lui qui recueille Sam quand sa famille adoptive ne veut plus de lui. Bruce est beau, il a de très belles lunettes.

      Disons un mot de la musique, elle est autant que la couleur partie intégrante de la patine du film. Une fois encore, Alexandre Desplat est aux manettes, il semble que mister Anderson se soit trouvé un alter égo à son goût pour les matières nobles. Petites cloches, chœurs d’enfants, roulements de tambour et laisser moi passer, j’ai envie entendre Françoise Hardy ! C’est le temps de l’amour et ça donne envie de s’en donner à cœur joie ! Ne ratez pas le générique final, un petit bijou, la partition y est commentée par la voix de notre ami Sam au fur et à mesure que les instruments s’expriment. L’émotion, enfin !

      Alt-J (∆) "An awesome wave"

      Originaires de Leeds, les jeunes membres de Alt-j risquent de frapper un grand coup dans le paysage musical de 2012. Après leur single "Matilda/Fitzpleasure" sorti en début d'année, c'est avec beaucoup d'impatience que l'on attendait "An awesome wave" et savoir si les espoirs fondés sur ce groupe allaient se transformer dans le long format. A l'écoute de l'album on est tout suite frappé par l' ambition, la maitrise et le talent de ces gaillards. Ce disque est d'une extrême beauté, Alt-j réussit son passage à l'album haut la main, entre math-rock, pop, folk, hip-hop et quelques incursions electro, le quatuor déploie un savant mélange de timbres d'une sensibilité étonnante. La voix de Joe Newman se déploie avec facilité sur ces ambiances, il  module ses intensités à travers les titres, l'ensemble prend alors une toute autre dimension qui l'envoie chatouiller les grands classiques pop-rock anglais. Les références paraissent multiples mais il se dégage une vraie profondeur et fraicheur dans cette musique qui devient dès la première écoute addictive. "Breezeblocks", "Tessellate" sont irrésistibles et le reste est aussi au niveau. Fascinantes de bout en bout les atmosphères se laissent porter par les cordes et les claviers/piano qui trouvent un équilibre parfait, la basse et la batterie entretiennent sur certains titres un groove sans en mettre plein la vue mais avec suffisamment d'impact pour que les morceaux gardent toujours une belle dynamique. Par moments, quelques nappes électro  font basculer certains titres dans de légères ambiances psychédéliques bien agréables. Alors "An awesome wave" petit chef-d’œuvre ? Certainement.

      Alt-j - an awesome wave - infectious - 2012

      Boris libéré...

      Boris Diaw doit avoir le sourire. Le joueur français vit une fin de saison  inespérée. Après des débuts prometteurs en NBA (finale de conférence avec les Suns de Phoenix à 25 points de moyenne, et un titre NBA de joueur ayant le plus progressé en 2006), Boris avait subi la loi des transfert en NBA, devant quitter du jour au lendemain un bon club NBA pour une des pires franchises : les Charlotte Bobcats (présidés par Michael Jordan). Boris s'y enterre petit à petit, jusqu'à perdre sa place dans le 5 majeur. Mais Bobo est assez malin, et rachète la fin de son contrat, lui permettant ainsi de signer dans le club de son choix. «  Boris est enfin libéré », comme l'espérait l'ancien joueur et coach Jacques Monclar. En mars, au milieu de la saison, les Spurs de son ami de l'Insep Tony Parker l'accueillent à bras ouvert (et l'héberge) ; malgré des critiques concernant sa « mollesse », le coach Greg Popovich voit dans Boris le joueur capable de mieux faire jouer les autres. Intégré dans le 5 de départ, le « facilitateur », comme il aime se surnommer, ne court pas après les statistiques mais s'appuie sur un jeu altruiste et  collectif. Désormais en finale de conférence, Boris vise le titre NBA ! Quel renversement de situation en quelques mois. Ce fils d'une des plus grande basketteuse française (Élisabeth Riffiod) et d'un père sénégalais sauteur en hauteur, est aussi président du club J.S.A. Bordeaux (en ProB) qu'il n'a pas hésité à aider en  y jouant pendant la grève de la NBA. Dans l'ombre de l'incroyable Parker,  Boris s'affirme comme le plus complet basketteur  français de tous les temps (en étant capable de jouer meneur, ailier ou pivot !).  Avec en apothéose les JO de Londres  en tant que capitaine des bleus... Affaire à suivre. Kenavo.