Prisoners de Denis Villeneuve

Il y a deux ans sortait le film Incendies, je vous avoue que je ne m’en suis toujours pas remis. La force de ce film, sa beauté grave, l’émotion de ce drame immense, comme un diamant noir qui continue de briller. Autant dire que l’attente du nouvel opus du réalisateur canadien Denis Villeneuve était sincère.
  
Cette fois encore il nous conte une histoire terrible, de celles que l’on n’espère jamais avoir à vivre, un cauchemar. Dans la banlieue de Boston, deux fillettes de 6 ans, Anna et Joy, disparaissent. Le détective Loki privilégie la thèse du kidnapping suite au témoignage de Keller, le père d’Anna. Un suspect parfait est rapidement arrêté, mais il est relâché quelques jours plus tard faute de preuve, entrainant la fureur de Keller. Aveuglé par sa douleur, le père dévasté se lance alors dans une course contre la montre pour retrouver les petites. De son côté, Loki essaie de trouver des indices pour arrêter le coupable avant que Keller ne commette l’irréparable… Les jours passent et les chances de retrouver les fillettes s’amenuisent…

Saluons l’ambition du réalisateur de nous donner à voir un thriller en  tension, rugueux, interminable et qui va beaucoup trop loin. Le film contient des scènes d’une violence physique insoutenable et d’une cruauté mentale qui glace le sang. Mais par le malaise il réussit parfaitement à nous faire ressentir la folie qui dévore le père (Hugh Jackman effrayant, terrible). Il ne se résigne jamais, il est fou et il va dans le mur, mais il est sûr de lui. Il capture le jeune simplet qui fait office de suspect/coupable idéal et lui fait vivre un enfer. Et s’il avait tord et s’il avait raison ?

La force du film c’est aussi sa durée, son piétinement insupportable qui peut nous faire penser à Zodiac de David Fincher. On se fatigue, on a déjà renoncé depuis longtemps, c’est plié on a envie d’aller se coucher. Mais non ! Pas du tout. Parallèlement à la recherche du père, l’enquête officielle continue et le flic (Jake Gyllenhaal) suit une voie dénuée d’affect (quoique) et qui se révèle passionnante. En partant sur la piste de tous les délinquants sexuels de la région, il met en lumière les liens horribles qui peuvent exister entre les enfants victimes et leurs bourreaux à l’intérieur desquels vivent encore trop fort les fantômes des enfants victimes qu’ils ont été un jour. Cette logique infernale, ce dessin mystérieux que l’on ne peut déchiffrer sans trembler, irrigue chaque étape de l’enquête. Le labyrinthe est dessiné, sans cesse reproduit, mais dans quel monde dément nous perd-t-il ? Sommes-nous nous aussi en train de basculer dans une folie glauque ? Ce qui est sûr c’est qu’on patauge dans une lourde ambiguïté, on est  perdu, ça fait peur, c’est délicieux.

Il est temps de parler du coupable idéal. Dans le rôle du pauvre zozo, il faut saluer l’extraordinaire performance de Paul Dano, tout simplement fabuleux. Avec ses gros yeux apeurés et sa drôle de voix fluette, il nous fait goûter à une douleur inouïe et très vite on est avec lui et on a peur.

Mais il serait criminel que d’en raconter davantage, alors si vous êtes en quête d’expérience d’une intensité peu commune, ne passez pas votre chemin. Prisoners est de ces films qui vous font goûter au vertige et vous marquent pour longtemps. Imaginez, vous-êtes dans le noir, tendez l’oreille et vous entendrez peut-être l’écho d’un petit sifflet qui résonne dans la nuit.

Manu

La Bande-annonce :



1 commentaire:

  1. Je l'ai loupé au ciné mais il a l'air terrible. J'adore l'acteur et dans un rôle de anti héros ça doit être sympa

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