« The Informant ! », Steven Soderbergh

Voici le dernier opus de Soderbergh, qui fut révélé en 1989 par son film Sexe, mensonges, et vidéo avec lequel il reçoit la palme d’or. Il est depuis un réalisateur prolifique qui alterne film expérimental (Schizopolis, Full Frontal, Bubbles) et film commercial (La série Ocean, Traffic). Ceci étant, la frontière entre ses différentes réalisations n’est pas aussi marquée: le style des unes nourrissant les autres et vice versa. Soderbergh est avant tout un cinéaste qui explore. Cette année encore, il ne déroge pas à sa réputation et a sorti en catimini au début de l’été Girlfriend Experience avec Sasha Grey, star du X américain avant de sortir à la fin de l’été The Informant avec Matt Damon — Ce film raconte l’histoire de Mark Whitacre, cadre supérieur d’une entreprise agro-alimentaire qui décide sur un coup de tête de balancer aux autorités les pratiques frauduleuses de son groupe. Il devra, pour prouver cela, devenir l’informateur du FBI mais comme l’indique l’excellente affiche du film “il ne vous a pas tout dit…”. En effet, le héros farfelu de ce film n’aura de cesse de modifier son témoignage omettant même de dire aux autorités qu’il bénéficie lui aussi de certaines de ces pratiques — C’est tout l’intérêt de ce film qui suit les mésaventures d’un personnage complexe, ambigu qui se veut à la fois le révélateur d’une politique de la transparence alors qu’il est lui même malhonnête. Soderbergh aborde ici l’un de ses thèmes de prédilection, le mensonge, la face cachée des apparences mais aussi l’adversité et l'argent— L’intrigue ne cesse de nous dérouter comme le fait Mark Whitacre avec les représentants du FBI tout au long de l’histoire et alterne ainsi entre le film d’espionnage industriel et la comédie. Un ton vériste aurait sûrement donné une vision pathétique du personnage mais c’est sans compter sur le réalisateur qui a une réelle sympathie pour lui. Les choix de mise en scène sont utilisés dans ce sens et illustrent principalement les complexes méandres du cerveau du héros et le décalage entre ce dernier et la société dans laquelle il évolue. En ce sens le film est plutôt réussi. L’histoire se passe au début des années 90 alors que par exemple la BO signée Marvin Hamlisch, un maitre de la musique de film puisqu’il a entre autre signé la musique de l’arnaque, est dans un style rétro-jazzy pleine de swing digne des soundtracks des 70's. Ces mélodies aux touches humoristiques, positives, et bondissantes, appuyée par une photographie au couleurs passées, signée Soderbergh "himself", contribuent a donner un aspect vintage au film. Le ton léger, enjoué et décalé choisi par Soderbergh pour nous raconter cette invraisemblable histoire qui s’inspire pourtant d’une histoire vraie nous aide à ne pas tomber dans l’ennui qui se fait pourtant un peu sentir dans la première partie du film. Ceci vient d’un scénario un petit peu trop alambiqué qui perd volontairement notre attention. — Même si le film gagne en intérêt sur la dernière demie-heure, on retiendra surtout de ce dernier Steven Soderberg qu’on a vu plus inspiré (L’anglais!), l’interprétation de Matt Damon. Il signe ici encore une fois une réelle performance, subtile et nuancée. Il explore toutes les facettes de son personnage qui passe de rusé potentiel à idiot éventuel, de complètement dérangé à possible manipulateur. Il rend son personnage drôle et éminemment attachant. Ce rôle lui permettra sans nul doute de concourir aux Oscars et d’y être récompensé comme Julia Roberts qui interprétait Erin Brockovich, autre film de Soderbergh basé sur un personnage réel qui défraya la chronique US.

The Informant ! - Steven Soderbergh - 2009 - Warner Bros



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